Disparités territoriales
Bien que la population considérée « pauvre » soit passée de 7.5 millions en 2004 à 2.8 millions en 2014[2], le taux de pauvreté[3] demeure élevé dans le rural et dans certaines régions et provinces du pays. Comme exemple, la région Drâa-Tafilalet présente un taux de pauvreté de 14,5%. Un taux largement supérieur à la moyenne nationale, dépassant ainsi de plus de 5 points la région de Béni Mellal- Khénifra, classée seconde au niveau national, et de plus de 10 points relativement à la moitié des régions du royaume. Du côté des provinces, Figuig affiche le taux de pauvreté le plus élevé du pays, soit 40.5%, un taux qui passe à 68.2% dans le rural !
Bien que le rythme d’évolution des niveaux de vie à l’échelle des unités territoriales amorce un processus de convergence devant, à terme, en réduire les inégalités, les disparités territoriales demeurent extrêmement élevées au Maroc. La pauvreté dans les régions et provinces les plus défavorisées sont principalement dues au manque d’éducation des adultes, au faible niveau de scolarisation des enfants, aux difficultés d’accès à l’eau, à l’électricité et à l’assainissement, et au manque de soins et aux conditions d’habitat difficiles, voire précaires pour certains cas.
Cas des Ksars : Provinces du Sud-Est marocain
Quelques enquêtes socio-économiques locales réalisées dans les Ksars de la région de Drâa Tafilelt et dans la province de Figuig présentent des bilans que l’on ne peut qualifier que d’alarmants !
En effet, cette catégorie de la population marocaine qui vit dans ce type d’habitation, bien que faisant partie du patrimoine architectural marocain, souffre de pauvreté extrême et de conditions de vie dérisoires.
Education et scolarité
Plus de la moitié des chefs de ménages n’ont pas dépassé le niveau primaire. Ce taux passe à 90% au Ksar Tabouassamt (Province d’Errachidia), et où le taux d’analphabétisme des adultes dépasse les 61%. Chez les femmes, le constat est encore plus affligeant : la très grande majorité des femmes habitants dans les Ksars n’ont jamais été scolarisées.
Le niveau de scolarisation des enfants est relativement plus élevé, cependant très peu d’entre eux atteignent le lycée (6% dans le Ksar Amezrou – Province de Zagora).
Occupation, formation et revenus
Plus du quart des chefs de ménage se déclarent au chômage, pourtant, seulement une minorité dispose d’un travail permanent. Plus de 50% des chefs de ménage ayant un emploi travaillent en temps partiel (57% au Ksar Taourirt – Province de Ouarzazate). 9 femmes sur 10 n’ont aucune activité.
Plus de 80% des revenus mensuels des ménages sont en deçà des 1000 DH. Au Ksar Oulad Yahya (Province d’Errachidia), 42% des chefs de ménages disposent de moins de 500 DH par mois !
Caractéristiques d’habitation – Equipements et installations
Plus de 95% des habitats présentent une superficie de moins de 50 m², pour la plupart construites en pisé, et se caractérisant par leur insalubrité. Le manque de moyens empêche la réhabilitation des maisons, des logements qui souffrent, sauf pour des cas rares, de manque de sanitaire, de mauvaise étanchéité de murs et de toiture et de manque de lumière.
Les principaux équipements et installations communes qui manquent le plus dans les Ksars résident en particulier, selon la population locale, en les routes, les lieux publics, les hammams et les commerces. Au Ksar L’maiz (Province de Figuig), 95% de la population considère ces besoins d'urgents.
Enfin, bien que leurs conditions de vie soient très dures, les habitants des Ksars expriment en grande majorité leur attachement à leur milieu d’habitat. A cet égard, il est nécessaire, sinon impératif que les pouvoirs publics puissent effectuer un nouveau ciblage de la pauvreté, performer les politiques de lutte contre la pauvreté, mais surtout accorder une importance particulière aux provinces défavorisées du Sud-Est du pays, et en particulier les populations des Ksars, qui, en dépit des privations extrêmes auxquelles elles font face, permettent au Maroc de continuer à préserver une richesse culturelle et architecturale unique.
[1] Enquête nationale sur la consommation et les dépenses des ménages 2013-2014 - HCP
[2] Cartographie de la pauvreté multidimensionnelle 2004-2014 : Paysage territorial et dynamique - HCP
[3] C’est la proportion des personnes pauvres dans la population, voire le pourcentage des individus membres d’un ménage dont la dépense par tête est inférieure au seuil de pauvreté relative. En 2007, ce seuil a été de 3834 DH par personne et par an en milieu urbain et de 3569 DH par personne et par an en milieu rural.